Oui, je me rappelle… |
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Opinion |
Écrit par Gilles Bouvrette |
Jeudi, 09 Juin 2011 |
Claude,
Comme lorsque j’avais appris la mort de Félix en 1988, mon cœur est rempli d’une profonde tristesse.
Il y a eu, enfin, ce spectacle d’avril 2004 au Théâtre Lionel-Groulx, quinze jours avant ton AVC. Sachant que, pour ce spectacle, tu étais seul au piano, j’ai eu l’idée de t’écrire, comme on envoie une bouteille à la mer. Connaissant ton lieu de résidence, à Saint-Benoit de Mirabel, j’ai donc posté cette lettre en me disant que je n’avais rien à perdre. J’y disais toute l’affection que moi et ma conjointe, nous avions pour toi et ton œuvre. Je t’indiquais que nous serions présents à ce rendez-vous que tu nous donnais. Et je te demandais une faveur. Ne sachant pas le programme musical de ce rendez-vous, je te demandais, si cela n’était pas déjà prévu, si tu pouvais y interpréter ce que je considère comme une des plus chansons de l’humanité, « Avec nos yeux, avec nos mains », chanson que tu avais composée avec Gilles Vigneault dans les années soixante. Nous avons assisté à cet autre moment de grand bonheur que tu avais préparé pour nous tous. Ma chanson n’était pas au programme. Toutefois, lors du deuxième rappel, en tombée finale du rideau, tu as parlé d’une lettre que tu avais reçue et qui te demandait de nous offrir une chanson qui t’était chère à toi aussi. Sans même la nommer, tu t’es placé à ton piano et, dès les premières notes, la salle d’un commun accord t’a témoigné tout le bonheur que tu ne cessais de lui procurer. Et que dire du mien, en particulier! Dans ma tête, tu jouais avant tout pour moi. Quel beau et immense cadeau de la vie! Après ce concert, j’avais pris quelques secondes pour te remercier personnellement de ta si grande générosité. Quinze jours plus tard, j’avais appris avec beaucoup de tristesse cet AVC qui t’avais foudroyé à jamais sur scène. Je savais que ce que j’avais vécu lors de notre dernière rencontre, si fraîche encore dans ma mémoire, serait à tout jamais un des grands moments inoubliables de ma vie. Aujourd’hui, tu nous as quittés pour rejoindre les grands chantres francophones de notre humanité, les Leclerc, Brel, Brassens, Ferré et tant d’autres. Que le Paradis est privilégié! Heureusement, les Séguin, Piché, Boucher, Dufresne et plusieurs autres sont toujours parmi nous pour chanter comme toi notre quotidien et la beauté du monde, malgré tout. Mon cher Claude, oui, je me rappelle! Allez, au revoir… Pierre Lauzon
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